L’installation d’un pilote de 80 m3 sur la plateforme PRIME a permis de décrire l’infiltration dans le sous-sol des PFAS contenus dans des mousses anti-incendie. © BRGM
Risques liés au sol et au sous‑sol
Résultat remarquable / Vers le traitement des « polluants éternels »
Ce sont des substances utilisées pour leurs propriétés variées – antiadhésives, imperméabilisantes, résistantes aux fortes chaleurs… – dans de nombreux secteurs industriels (pharmaceutique, phytosanitaire, cosmétique, aéronautique, textile…) et de nombreux produits du quotidien, des poêles aux vêtements en passant par les emballages alimentaires et certaines mousses anti-incendie. Mais ce sont aussi les substances d’origine anthropique les plus persistantes connues à ce jour, en raison de la stabilité chimique et physique de leurs liaisons carbone-fluor. Si le recours aux substances per- et polyfluoroalkylées, ou « PFAS », est de plus en plus encadré, en termes de production, d’utilisation et de surveillance, ces composés synthétiques fabriqués depuis les années 1950 sont déjà présents en quantité dans l’environnement. Et l’on parle de plusieurs milliers de molécules distinctes…
Un état des connaissances internationales
Au BRGM, pas moins de vingt scientifiques travaillent sur ce sujet qui touche à plusieurs domaines. L’établissement est fortement mobilisé sur le plan d’action interministériel sur les PFAS lancé au printemps 2024, notamment sur le volet des connaissances. « Nous avons dressé un inventaire des différents PFAS susceptibles d’être présents sur les sites utilisant des mousses anti-incendie à travers le monde, dans le but d’identifier les substances qui pourraient faire l’objet d’un suivi en France et de concevoir la méthodologie à mettre en place, énumère Amélie Cavelan. Nous avons également réalisé un état des lieux des méthodes et des résultats des campagnes menées à l’international pour déterminer les valeurs de fond des PFAS dans les sols. Nous avons, enfin, produit une synthèse des pratiques mises en œuvre dans le monde pour rechercher, identifier et quantifier ces molécules dans un environnement considéré. » À ces rapports s’ajoute la création de l’outil en ligne « Info PFAS » qui permettra, à compter de l’été 2025, de visualiser toutes les données publiques collectées dans le cadre de ce plan, et même au-delà. « Ces travaux s’alimentent les uns les autres et enrichissent les connaissances », souligne Julie Lions. ActiviPoll, le site du BRGM qui répertorie et qualifie les corrélations entre les activités économiques et les pollutions pouvant leur être associées, a ainsi pu être complété avec les informations sur les PFAS.
Le BRGM mène également des travaux – pluridisciplinaires – de recherche et développement sur le comportement de ces molécules et leur destruction. Et les avancées sont notables. Initié en 2021 et coordonné par le BRGM, le projet européen PROMISCES permet d’étudier toute la chaîne de traitement des PFAS, qui plus est à grande échelle sur la plateforme expérimentale PRIME, dédiée à la remédiation des sols et des eaux souterraines pollués. « Nous avons installé un ‘pilote plurimétrique’ de 80 m3 qui nous a permis, grâce à une batterie d’appareils de monitoring, de suivre l’infiltration de mousses anti-incendie dans le sol puis le transfert des PFAS vers la nappe souterraine, détaille Stefan Colombano. Ces données ont servi à décrire le comportement de ces molécules et à modéliser leur distribution dans le sous-sol. »
Le BRGM a mis au point un procédé à base de liquides « rhéofluidifiants », qui permet d’extraire les PFAS des sols contaminés. © BRGM
Optimisation technico-économique
Le pilote plurimétrique permet ensuite d’expérimenter des techniques de dépollution et d’en évaluer le rendement épuratoire. Deux méthodes sont appliquées pour détruire les PFAS : la réduction et l’oxydation chimiques avancées, qui font intervenir un solvant pour briser les liaisons carbone-fluor, et la sonocavitation, qui utilise des ultrasons dans l’eau pour générer des microbulles dont l’implosion dégrade les molécules. « Ces techniques affichent des performances différentes et complémentaires en termes de vitesse de réaction, de concentration en PFAS pouvant être traitée et de taux de destruction, explique Maxime Cochennec. Mais elles présentent aussi des freins, notamment la quantité d’énergie nécessaire et le coût du traitement. Les recherches visent donc à optimiser ces méthodes de dépollution au plan technico-économique. » Première étape importante : l’extraction des PFAS. Le BRGM a mis au point, à partir de fluides « rhéofluidifiants », un procédé efficace pour en extraire un maximum avec un minimum de liquide. Deuxième étape clé : reconcentrer les PFAS. « C’est notamment sur cette opération préalable à la destruction que porteront nos prochains projets de recherche », annonce Stefan Colombano.
Les résultats de PROMISCES, achevé en avril 2025, nourrissent d’ores et déjà les politiques publiques en lien avec les PFAS. « En plus de la mise en ligne d’un outil d’aide à la décision destiné aux gestionnaires de sites, sols et eaux pollués, indique Julie Lions, nous avons rédigé des policy briefs, des recommandations pour orienter l’action publique et la programmation de la recherche sur ce sujet. »