Vue du site de géothermie profonde de Vendenheim en Alsace. © Fonroche Géoth_2
Transition énergétique et espace souterrain
Résultat remarquable / Bonnes pratiques pour maîtriser la sismicité induite dans les projets de géothermie profonde
Le 12 novembre 2019, un séisme largement ressenti survient dans la région de Strasbourg. Non loin de là, à Vendenheim, deux forages sont développés en vue de l’installation d’un doublet géothermique descendant jusqu’à 5 kilomètres dans le sous-sol. Un comité d’experts conclut à un séisme induit par ces opérations. Si l’exploration du site est stoppée, l’événement met en évidence le besoin de mieux évaluer et mieux prendre en compte ce risque. D’où la décision d’élaborer un guide visant à renforcer la prévention autour des opérations de géothermie profonde.
À la demande de la Direction générale de la Prévention des risques (DGPR) au sein du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, et de la Direction générale de l’Énergie et du Climat (DGEC) au sein du ministère de la Transition énergétique, le BRGM et l’Ineris s’attellent à la tâche, dans le sillage de la réforme du code minier de 2021 et de la loi Climat et résilience. Les enjeux sont multiples et complémentaires : « Sécuriser les investissements des exploitants de la géothermie profonde, soutenir les politiques publiques des collectivités en matière de transition énergétique et assurer les populations d’une conduite responsable et maîtrisée des opérations, énonce Pascal Dominique, sismologue. Dans un contexte de changement climatique, cette source d’énergie renouvelable et non intermittente peut en effet contribuer à la transition vers un mix énergétique moins carboné. »
Applicable à tous les projets de géothermie profonde
Paru en juin 2023 et diffusé sur les sites institutionnels (ministères, BRGM, Ineris…) et spécialisé (geothermies.fr), le Guide de bonnes pratiques pour la maîtrise de la sismicité induite par les opérations de géothermie profonde s’adresse à l’ensemble des parties prenantes de la filière : exploitants, pouvoirs publics, riverains, élus et associations. Il est aussi applicable à tous les projets de géothermie profonde, couvrant les différentes typologies de réservoirs géothermiques et de méthodes d’exploitation rencontrées sur le territoire métropolitain et dans les départements et régions d’outre-mer.
Pensé comme un mode d’emploi, il s’appuie sur de nombreux retours d’expérience, sur l’état actuel des connaissances scientifiques dans le domaine de la sismicité induite par injection de fluide dans le sous-sol profond et sur une méthode mise au point par le BRGM et l’Ineris. « Nous avons fait le choix, explique Julie Maury, sismologue, de proposer des “arbres de décision” : à chaque étape clé d’un projet, d’avant le premier forage jusqu’à la cessation de l’activité, en passant par les périodes de stimulation, le guide aide à évaluer le niveau de l’aléa de sismicité induite. Il livre également des recommandations sur les données à acquérir pour anticiper autant que possible le comportement hydromécanique du réservoir mais aussi sur le réseau de surveillance et le pilotage des opérations selon le niveau d’aléa sismique. » Le guide pose en outre les bases pour définir les protocoles opérationnels permettant de déployer les opérations, en fonction des technologies mises en œuvre et de la microsismicité détectée.
Le Guide de bonnes pratiques pour la maîtrise de la sismicité induite par les opérations de géothermie profonde" à pour vocation d'être enrichi à l'avenir par les expériences et les acquis des différents acteurs du secteur. © BRGM
À l’interface entre recherche et industrie
La sortie de ce guide s’est accompagnée de journées de formation en octobre 2023. Une formation construite à partir de ses enseignements et de ses recommandations sera en outre proposée par le BRGM et l’Ineris fin 2024, puis chaque année. L’objectif est identique : favoriser, chez les exploitants, une plus grande maîtrise des risques liés à la sismicité induite par les opérations de géothermie profonde. « Pour tout projet de ce type, il est essentiel de bien connaître la géologie du sous-sol et de comprendre les phénomènes naturels, notamment sismiques, susceptibles d’être activés par les travaux, afin de minimiser leur probabilité et leur intensité », résume Pascal Dominique.
Situé à l’interface entre la recherche et l’industrie, le guide se veut enfin « vivant ». « En fonction des applications qui en seront faites, de l’avancée des connaissances et des nouveaux retours d’expérience, le contenu pourra être enrichi, précisé ou modifié », avance Julie Maury. « Ce guide, poursuit Pascal Dominique, constitue un premier référentiel – il n’en existait pas jusqu’à présent – concernant ce risque. Il pallie un vrai manque et permet d’initier la diffusion et le partage de bonnes pratiques afin de favoriser, par le renforcement de la maîtrise des projets, la poursuite du développement de la géothermie profonde en France. »
Carte des ressources géothermiques profondes potentielles et des installations de géothermie profonde actives et en développement pour la production de chaleur. © BRGM